Des nouvelles d’Ivan (fin avril 2023)

Ivan nous informe d’une nouvelle fouille de sa cellule faite par les ELAC, le 12 avril (c’est la 5ème depuis décembre). Un téléphone a été trouvé. Le compagnon n’est pas encore passé au prétoire. Malgré son isolement presque complet, il reste déterminé.

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Chiffrement du disque dur (Linux) : Mettez à niveau votre fonction de dérivation de clé LUKS

Publié à l’origine sur Hacking Lord Sutch


Voici un article d’un anarchiste français décrivant comment son ordinateur portable (chiffré) a été saisi après son arrestation, et le matériel de la partition cryptée a depuis été enregistré comme preuve contre lui. Son mot de passe de cryptage était censé être supérieur à 20 caractères et comprenait un mélange de lettres, de chiffres et de caractères spéciaux, donc en l’absence de toute sorte d’échec d’opsec, cela implique que même des mots de passe relativement complexes peuvent maintenant être forcés brutalement, et nous devrions passer à des phrases secrètes encore plus sécurisées.

PS : En réalité, cette histoire de mot de passe décrypté est litigieuse et il y a anguille sous roche. Avec un mot de passe correctement formé et un chiffrement réalisé sur un système correctement mis à jour, il n’y aurait pas assez de la durée de vie de l’univers pour décrypter en brute force. Le plus probable est soit qu’il a utilisé un moyen mnémotechnique et que le chiffrement a été cassé par une méthode stochastique, soit que son système n’était pas à jour. Il ne faut jamais utiliser de moyen mnémotechnique et toujours apprendre les mots de passe par cœur, et il faut faire quotidiennement les mises à jour du système. Cependant, nous avons quand même publié l’article sur la mise à niveau, par principe il faut toujours utiliser le moyen le plus sûr et toujours faire les mises à jour.

Que se passe-t-il ? Voyons ce que LUKS fait en premier lieu. Les données réelles sont généralement chiffrées avec AES, un algorithme de cryptage extrêmement populaire et bien testé. AES n’a pas de faiblesses majeures connues et n’est pas considéré comme pratiquement brutal – du moins, en supposant que vous ayez une clé aléatoire. Malheureusement, il n’est pas vraiment pratique de demander à un utilisateur de saisir 128 bits de binaire à chaque fois qu’il souhaite déverrouiller son lecteur. Une autre approche doit donc être adoptée.

Ceci est géré à l’aide de ce qu’on appelle une « fonction de dérivation de clé », ou KDF. Un KDF est une fonction qui prend une entrée (dans ce cas, le mot de passe de l’utilisateur) et génère une clé. Comme exemple extrêmement simple, pensez à MD5 – il prend une entrée et génère une sortie 128 bits, nous pourrions donc simplement MD5 le mot de passe de l’utilisateur et utiliser la sortie comme clé AES. Bien que cela puisse techniquement être considéré comme un KDF, ce serait extrêmement mauvais ! Les MD5 peuvent être calculés extrêmement rapidement, donc quelqu’un essayant de forcer brutalement une clé de chiffrement de disque pourrait simplement générer le MD5 de chaque mot de passe plausible (probablement sur beaucoup de machines en parallèle, utilisant probablement des GPU) et tester chacun d’eux pour voir s’il déchiffre le lecteur.

(les choses sont en fait légèrement plus compliquées que cela – votre mot de passe est utilisé pour générer une clé qui est ensuite utilisée pour chiffrer et déchiffrer la clé de chiffrement réelle . Ceci est nécessaire pour vous permettre de changer votre mot de passe sans avoir à chiffrer à nouveau le lecteur entier – à la place, vous rechiffrez simplement la clé de chiffrement avec la nouvelle clé dérivée du mot de passe. Cela vous permet également d’avoir plusieurs mots de passe ou mécanismes de déverrouillage par lecteur) Les bons KDF réduisent ce risque en étant ce que l’on appelle techniquement « coûteux ». Plutôt que d’effectuer un simple calcul pour transformer un mot de passe en clé, ils effectuent beaucoupde calculs. Le nombre de calculs effectués est généralement configurable, afin de vous permettre de faire un compromis entre le niveau de sécurité (le nombre de calculs que vous forcerez un attaquant à effectuer lorsqu’il tente de générer une clé à partir d’un mot de passe potentiel) et les performances (le niveau de temps que vous êtes prêt à attendre que votre ordinateur portable génère la clé après avoir tapé votre mot de passe pour qu’il puisse réellement démarrer). Mais, évidemment, ce compromis change avec le temps – les défauts qui avaient du sens il y a 10 ans ne sont pas nécessairement de bons défauts aujourd’hui. Si vous avez configuré votre partition cryptée il y a quelque temps, le nombre de calculs requis peut ne plus être considéré comme à la hauteur.

Et bien, certaines de ces hypothèses sont plutôt mauvaises en premier lieu ! Le simple fait de rendre les choses coûteuses en calcul n’aide pas beaucoup si votre adversaire a la capacité de tester un grand nombre de mots de passe en parallèle. Les GPU sont extrêmement efficaces pour effectuer le type de calculs que les KDF utilisent généralement, de sorte qu’un attaquant peut « juste » obtenir tout un tas de GPU et les lancer sur le problème. Les KDF qui sont coûteux en calcul ne font pas grand-chose pour se protéger contre cela. Cependant, il existe un autre axe de dépense qui peut être pris en compte : la mémoire. Si l’algorithme KDF nécessite une quantité importante de RAM, la mesure dans laquelle il peut être exécuté en parallèle sur un GPU est massivement réduite. Une Geforce 4090 peut avoir 16 384 unités d’exécution, mais si chaque tentative de mot de passe nécessite 1 Go de RAM et que la carte n’a que 24 Go à bord,

Ainsi, à l’heure où les attaquants ont accès à une pile de GPU, un KDF purement coûteux en calcul n’est tout simplement pas un bon choix. Et, malheureusement, le sujet de cette histoire en utilisait presque certainement un. Ubuntu 18.04 utilisait le format d’en-tête LUKS1 et le seul KDF pris en charge dans ce format est PBKDF2 . Ce n’est pas un KDF coûteux en mémoire, et il est donc vulnérable aux attaques basées sur le GPU. Mais même ainsi, les systèmes utilisant le format d’en-tête LUKS2 utilisaient par défaut argon2i , encore une fois pas un KDF coûteux en mémoire qui est fort en mémoire, mais pas conçu pour résister aux attaques GPU (grâce aux commentaires soulignant mon malentendu ici). Les nouvelles versions utilisent par défaut argon2id, qui est.

Vous voulez utiliser argon2id.

Ce qui aggrave la situation, c’est que les distributions ne mettent généralement pas à jour cela de quelque manière que ce soit. Si vous avez installé votre système et qu’il vous a donné pbkdf2 comme KDF, vous utilisez probablement toujours pbkdf2 même si vous avez mis à niveau vers un système qui utiliserait argon2id lors d’une nouvelle installation. Heureusement, tout cela peut être réparé sur place. Mais notez que si quelque chose ne va pas ici, vous pourriez perdre l’accès à toutes vos données cryptées, donc avant de faire quoi que ce soit, assurez-vous qu’elles sont toutes sauvegardées (et découvrez comment garder ladite sauvegarde sécurisée afin que vos données ne soient pas simplement saisies de cette façon ).

Tout d’abord, assurez-vous que vous exécutez une version de votre distribution aussi à jour que possible. Avoir des outils prenant en charge le format LUKS2 ne signifie pas que votre distribution intègre tout cela, et les anciennes versions de distribution peuvent vous permettre de mettre à jour votre configuration LUKS sans réellement prendre en charge le démarrage à partir de celui-ci. De plus, si vous utilisez un /boot crypté, arrêtez maintenant – les versions très récentes de grub2 prennent en charge LUKS2, mais elles ne prennent pas en charge argon2id, ce qui rendra votre système impossible à démarrer.

Ensuite, déterminez quel périphérique sous /dev correspond à votre partition chiffrée. Exécutez

lsblk

et recherchez les entrées qui ont un type de « crypte ». Le périphérique au-dessus de celui-ci dans l’arborescence est le périphérique chiffré réel. Enregistrez ce nom et exécutez

sudo cryptsetup luksHeaderBackup /dev/whatever –header-backup-file /tmp/luksheader

et copiez-le sur une clé USB ou autre. Si quelque chose ne va pas ici, vous pourrez démarrer une image en direct et exécuter

sudo cryptsetup luksHeaderRestore /dev/whatever –header-backup-file luksheader

pour le restaurer.

(Modifier pour ajouter : une fois que tout fonctionne, supprimez cette sauvegarde ! ​​Elle contient l’ancienne clé faible, et quelqu’un qui la possède peut potentiellement l’utiliser pour forcer brutalement votre clé de chiffrement de disque à l’aide de l’ancien KDF, même si vous avez mis à jour le disque KDF.)

Ensuite, exécutez

sudo cryptsetup luksDump /dev/whatever

et recherchez la ligne Version:. S’il s’agit de la version 1, vous devez mettre à jour l’en-tête vers LUKS2. Exécuter

sudo cryptsetup convert /dev/whatever –type luks2

et suivez les invites. Assurez-vous que votre système démarre toujours, et si ce n’est pas le cas, revenez en arrière et restaurez la sauvegarde de votre en-tête. En supposant que tout va bien à ce stade, exécutez à nouveau

sudo cryptsetup luksDump /dev/whatever

et recherchez la ligne PBKDF: dans chaque emplacement de clé (faites attention uniquement aux emplacements de clé, ignorez toutes les références à pbkdf2 qui viennent après la ligne Digests :). Si le PBKDF est « pbkdf2 » ou « argon2i », vous devez le convertir en argon2id. Exécutez ce qui suit :

sudo cryptsetup luksConvertKey /dev/whatever –pbkdf argon2id

et suivez les invites. Si vous avez plusieurs mots de passe associés à votre lecteur, vous aurez plusieurs emplacements de clés et vous devrez répéter cela pour chaque mot de passe.

Distributions ! Vous devriez vraiment gérer ce genre de chose lors de la mise à niveau. Les personnes qui ont installé leurs systèmes avec vos paramètres de cryptage par défaut il y a plusieurs années sont maintenant beaucoup moins sécurisées que les personnes qui effectuent une nouvelle installation aujourd’hui. S’il vous plaît, s’il vous plaît, faites quelque chose à ce sujet.
SOURCE

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[Nancy] Proj-discussion sur le capitalisme vert et la répression

Publié à l’origine sur manif-est.info


Nous vous proposons une soirée sur le capitalisme vert, le samedi 29 avril à 20h au Geyser, 11 grande rue, derrière la bibliothèque/librairie associative Quartier Libre, Nancy. Projection du film Les Dépossédés (60 min, Antoine Costa, 2016), suivie d’une discussion sur l’association de malfaiteur.ices inculpées de sabotage de mâts de mesures d’éoliennes en Haute-Vienne.

« Le capitalisme a véritablement crée des richesses. Il a su en trouver là où l’on n’en voyait pas. Ou plutôt, il a crée de la valeur là ou l’on ne voyait que des richesses. En monétarisant la nature, en donnant une valeur à chaque chose, un prix à la biodiversité il achève dans un même mouvement de la saccager en la protégeant. » (les Dépossédés)

Nous vous proposons une soirée sur le capitalisme vert, le samedi 29 avril à 20h au Geyser / Quartier Libre, 11 grande rue, Nancy. Projection du film Les Dépossédés (60 min, Antoine Costa, 2016), suivie d’une discussion sur l’association de malfaiteur.ices inculpées de sabotage de mâts de mesures d’éoliennes en Haute-Vienne.

Présence d’un infokiosque sur le sujet.

Projection du long-métrage Les Dépossédés d’Antoine Costa (2016)

… sur la compensation biodiversité, la financiarisation de la nature et les biens communs ; suivi d’un court-métrage du même réalisateur sur le projet de fusion nucléaire ITER (toujours par le biais de la compensation carbone)..

« À l’heure où une nouvelle loi sur la biodiversité, dix mois après son passage devant l’Assemblée, est présentée au Sénat, ce documentaire revient sur un amendement faisant débat : celui de la compensation. Inscrit dans la législation dès 1976, mais jamais appliqué, le principe de compensation oblige un aménageur à compenser les dégâts qu’il cause sur la nature, en protégeant un territoire équivalent à celui qu’il vient de détruire. Mais cette nouvelle loi qui autorise la création de « réserves d’actifs naturels » ouvre aussi la voie à une monétarisation de l’environnement qui attise les craintes de certains écologistes. S’il suffit maintenant de compenser, c’est à dire d’acheter la nature, qu’est-ce qui arrêtera celui qui a les moyens de payer ? Quelques mois après la COP21 et alors que l’État s’apprête à reprendre l’offensive contre Notre Dame des Landes, la monétarisation de l’environnement semble être ici l’ultime fuite en avant du nihilisme marchand : protéger la nature en continuant de la saccager. L’économie arrivera-t-elle à sauver la biodiversité ?

En revenant sur l’exemple du marché carbone et l’histoire des régulations environnementales du début du 19 ème siècle, Les Dépossédés tente de répondre à la question. »

Bande annonce : https://yewtu.be/watch?v=kK_4327pTxA.

Autres textes/contributions du réalisateur :

Suivie d’une discussion sur l’association de malfaiteur.ices inculpées de sabotage de mâts de mesures d’éoliennes en Haute-Vienne, entre juillet et octobre 2022

Dans l’attente de leur procès (l’instruction est toujours en cours), iels ont été placées sous contrôle judiciaire : interdiction de communiquer entre elles, interdictions de territoire, obligation de verser une caution de 120 000€ (dont 100 000€ pour une des inculpées).

120 000€ ou de la préventive, en plus du racket, c’est vouloir faire payer cher, coûte que coûte, les inculpées ; encore une fois la justice de l’Etat est au service du capitalisme (concernant la caution à 100 000€, il y a 95 000 euros qui irait à l’entreprise WPD ON SHORE FRANCE).

L’inculpée qui a fait appel de cette décision (CJ à 100 000€) risque la détention provisoire à partir du 14 avril parce qu’elle ne veut pas payer sa liberté, parce qu’elle ne veut pas indemniser les prédateurs capitalistes ; elle va tenter d’aller jusqu’au bout. Ne pas céder au chantage.

Ce sera l’occasion d’en discuter ensemble.

Plus d’informations sur l’affaire :


Notes

[1SISME : comité de Soutien aux Inculpées de Sabotage de Mâts de mesure Eoliens

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Des nouvelles d’Ivan (avril 2023)

Reçu par mail

 

Bonjour,
j’écris pour donner quelques nouvelles sur ma détention et sur l’enquête.

Les « attentions » à mon encontre, de la part de l’AP (et/ou de la juge d’instruction ?), continuent. Encore des représailles pour mes grèves de la faim ? Qui sait…

En tout cas, le 14 février il y eu une troisième perquisition de ma cellule (après celles du 6 décembre et du 9 janvier). Vers 19h30 les ERIS ont débarqué avec casques, cagoules et boucliers. Ils étaient une douzaine, un gradé tenait des feuilles à la main, sur la première j’ai pu voir ma photo.
Notre cellule est la seule de cette aile à avoir été fouillée (mais ils ont fait passer un chien dans les couloirs), deux autres l’ont été dans une autre aile, je ne sais pas pour ce qui est des autres bâtiments. Il y avaient le directeur de la prison, Michael Merci, et la directrice adjointe qui regardaient, au delà des portes vitrées.
Des qu’on nous a fait sortir de la cellule, moi et mon codétenu (qui etait ici en bâtiment depuis une semaine à peine) on nous a menottés, après on nous a amenés dans le local des douches, au rez-de-chaussée, pour l’habituelle fouille à nu. Nous sommes restés enfermés dans les douches pendant les deux heures qui a duré la perquisition de notre cellule.
Ils ont trouvé un téléphone portable avec son chargeur. Le mardi 21 mars, je suis donc passé en conseil de discipline. Comme punition, pendant 30 jours je suis privé de la possibilité de cantinier.

Le 30 mars, rebelote. Les ELAC débarquent et l’histoire recommence, encore une fois.

En ce qui concerne l’enquête, ces derniers mois des nouveaux éléments ont été versés au dossier.
Le plus significatif est que la police a réussi à avoir accès à mes ordinateurs, même s’ils étaient chiffrés.
Celui du travail, sur lequel est installé Windows, est chiffré avec BitLocker. Un PV précédemment versé au dossier dit qu’ils avaient déjà essayé d’y accéder pendant ma garde à vue mais qu’ils n’avaient pas réussi. Mais en septembre la Brigade d’appui en téléphonie, cyber-investigation et analyse criminelle (BATCIAC) a envoyé à la SDAT une copie du disque dur. Dans le PV, ils expliquent seulement qu’ils ont démarré l’ordinateur avec une clef USB bootable et que, ensuite, ils ont utilisé le logiciel AccesData FTK imager 3.3.05 pour copier le disque dur. Mais ils ne parlent pas du déchiffrement en soi.
Mon ordinateur personnel, qui tourne avec Ubuntu 18, est chiffré avec Luks (le mot de passe est de plus de vingt caractères : lettres, chiffres, signes de ponctuation…). Je n’ai trouvé dans le dossier
aucune indication sur le moyen qu’ils ont utilisé pour le déchiffrer, mais là aussi ils ont fait une copie du disque dur. Il y a même des fichiers qui avaient été effacés et des e-mails qui avaient été
téléchargés avec Thunderbird (et ensuite effacés).
Ils n’ont trouvé rien qui puisse se rapporter aux incendies dont je suis inculpé. Mais je pense que le fait même qu’ils aient pu avoir accès à des disques durs chiffrés avec des logiciels censés être inviolables doit être connu le plus largement possible.

Mon courrier continue à être fortement ralenti (en moyenne, je reçoit les lettres un mois et demi ou deux mois après leur expédition) : la juge d’instruction lit toutes les lettres qui m’arrivent et que j’écris.
Quatre de mes lettres ont été photocopiées et versées au dossier : deux que j’avais écrit à des personnes de l’Envolée, une adressée à Boris (le compagnon bisontin qui est à l’hôpital après l’incendie de sa cellule à la prison de Nancy, en août 2021) et celle, adressée à la Gare, près de
Bure, dans laquelle j’expliquais que dans « mon » dossier apparait la plainte que le rédacteur en chef de l’Est Républicain a déposé contre les admins du site bureburebure.info pour avoir relayé la revendication de l’incendie d’une voiture du journal (incendie dont je suis accusé).

Autrement, ma détention préventive a été prolongée jusqu’à la mi-juin.

Je vais bien, je garde la pêche et regrette de ne pas pouvoir être dans les rues, ces temps-ci.
Une pensée solidaire pour Alfredo (et pour tous les compas en prison).
La solidarité c’est l’attaque !
Vive l’anarchie !

Ivan
8 avril 2023

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Non à la construction d’une nouvelle prison à Toul ! [tract]

Publié sur manif-est le 7 avril 2023

Non content de détenir un nombre record d’incarcération (30 000 places créées ces 30 dernières années, plus de 72 000 détenus au total), l’État français lance un nouveau Plan Prison démesuré : 33 nouvelles prisons d’ici 2027, soit 15 000 nouvelles places supplémentaires.

A Toul, après avoir abandonné le projet de prison de 600 places à Dommartin, l’État pourrait dès cette année commencer les travaux d’une prison censée accueillir d’ici 4 ans 180 détenus dans le quartier de la Croix de Metz. Avec celles d’Arras (Pas-de-Calais) et de Donchéry (Ardennes), cette prison fait partie des 3 prisons définies par le programme InSERRE [1] : un bagne moderne où des détenus en fin de peine ou condamnés à des peines de moins de 5 ans sont enfermés sur entretien d’embauche pour trimer à bas prix moyennant l’illusion d’une réinsertion par le travail.

Le ministre de la Justice Dupont-Moretti (lui-même accusé de prise illégale d’intérêts, de conflits d’intérêts et d’omission de déclaration de plus de 300 000 euros) affirme que ces prisons-usines offriraient de meilleures conditions de détention en récompense de l’engagement professionnel des détenus. La promesse de bons traitement n’est en vérité qu’une stratégie d’asservissement des détenus à des conditions salariales dégradantes (salaire moins de la moitié du SMIC, 6 jours de congés payés par an, aucuns droits syndicaux…), profitables surtout aux entreprises auxquelles est proposée une main d’oeuvre bon marché et privée de ses droits. Tout ce qui n’est pas (encore) possible dans l’exploitation salariale conventionnelle le devient grâce à la prison !

L’enfermement est avant tout un business juteux pour les entreprises qui participent à la construction des prisons (Eiffage, Bouygues, Vinci…) et opèrent ensuite à l’intérieur dans le nettoyage, l’intendance et les ateliers (Microsoft, Safran, L’Oréal, La Redoute, Yves Rocher, Bic…). Avec le centre de détention d’Ecrouves et celui de Toul, la maison d’arrêt de Nancy-Maxéville et le centre de semi-liberté de Maxéville, le secteur pénitentiaire est ainsi déjà mis au service de l’économie et du développement territorial de la région Toul-Nancy avec un total de près de 1 400 détenus. Selon les mots d’Alde Harmant lui-même, maire de Toul, la nouvelle prison sera surtout importante pour l’investissement estimé à 35 millions d’euros et les emplois publics attendus, qui « viennent conforter le renouveau économique collectivement engagé depuis une décennie, avec et pour nos entreprises ». A bon entendeur…

***

Présentée comme une institution censée protéger la société d’individus ayant enfreint la loi, prévenir les crimes par la dissuasion, accompagner les détenus dans la « rémission », la prison n’est en vérité qu’un outil d’oppression des classes dominées. A l’impunité de la classe politique et économique fait face l’explosion de la détention provisoire, des incarcérations sans jugement, sur délit de faciès et sur comparution immédiate pour délits mineurs, sans possibilité de préparer sa défense… Jamais une nouvelle prison n’a permis d’alléger la surpopulation des prisons déjà existantes : au moyen d’une inflation législative visant à criminaliser les populations les plus précaires, l’État enferme toujours aussi massivement que le nombre de nouvelles places créées le lui permet.

La prison est un lieu où sont reproduites toutes les injustices, les hiérarchies, les dominations et les violences de notre société. Elle ne résout pas plus les problèmes de sécurité qu’elle n’aide à la réinsertion car ce n’est pas son objectif, et tous les discours qui veulent nous le faire croire ne sont que de la poudre aux yeux lancée par ceux qui contrôlent la Justice et que la Justice protège.

Non à la prison-usine de Toul
Non à la réintégration par le travail
Contre la violence d’État, désintégrons toutes les prisons !

stop-prison-toul@riseup.net

Tract au format PDF

Notes

[1« Innover par les structures expérimentales de responsabilisation et de réintégration par l’emploi »

 

 

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[Affaire du 8 décembre] L’État attaqué en justice pour atteinte à la dignité humaine.

Publié le 2 avril 2023 sur soutien812.net

 

Alors que les récents évènements à Sainte-Soline et contre la réforme des retraites ont remis sur le devant médiatique l’usage de techniques contre-insurrectionnelles contre des militant.es politiques, deux inculpé.es de « l’Affaire du 8 décembre » attaquent l’État en justice suite aux conditions inhumaines de leur détention provisoire. Témoignage à l’appui.

COMMUNIQUÉ

Le 8 décembre 2020, neuf personnes désignées comme appartenant à l’ »ultragauche » étaient arrêtées par la DGSI et accusées de terrorisme. Alors que l’instruction n’a jamais permis d’établir l’existence du moindre projet d’action violente, les 7 mis.es en examen sont désormais libres sous contrôle judiciaire. Leur procès devrait se dérouler dans les prochains mois.

Le chef d’inculpation d’ »association de malfaiteurs terroristes » a été utilisé comme un véritable passe-droit par l’administration pénitentiaire pour leur imposer des conditions de détention provisoire particulièrement dégradantes et violentes.

Camille et Libre Flot ont décidé de combattre deux de ces pratiques en témoignant et en attaquant l’État en justice : les fouilles à nues systématiques pour la première, et le placement à l’isolement pour le second. Leurs recours seront bientôt examinés par le tribunal administratif. La date d’audience pour Libre Flot est fixée au 4 avril, ce mardi.

Libre Flot a passé plus de 16 mois à l’isolement, provoquant pertes de mémoire, troubles de la concentration, pertes de repères spatio-temporels, maux de tête, vertiges. Autant de conséquences d’une pratique d’un autre âge condamnées par de nombreuses instances de défense des droits humains et qui relève de la torture dite « blanche ».

Malgré ses nombreuses demandes de sortie d’isolement, faisant état des conséquences dramatiques sur sa santé, abondamment documentées, cette mesure continua d’être prolongée tous les 3 mois. Au bout d’un an, c’était au ministre de la justice lui-même d’approuver lui-même le renouvellement de cette pratiques aux dangers largement reconnus. Ce dernier n’hésita d’ailleurs pas à la renouveler alors même que Libre Flot avait entamé une grève de la faim depuis plus de 15 jours. Ce qui le poussera à prolonger sa grève pendant 3 longues semaines (36 jours au total) à la fin desquelles, au bord du coma, il sera hospitalisé. Ce n’est qu’alors que le juge d’instruction se résigna à lui accorder une libération sous bracelet électronique « pour raisons médicales ».

Camille a quant à elle subit, en toute illégalité, des fouilles à nue pendant plus de 4 mois. Ces fouilles dites « intégrales » sont particulièrement humiliantes et destructrices. Alors que celles-ci sont strictement réglementées et doivent être individuellement motivées, elles sont pourtant utilisées à tout va par l’administration pénitentiaire (voir article OIP). Le directeur de Fleury-Mérogis ira jusqu’à affirmer à Camille que ces fouilles systématiques sont « la politique de l’établissement », reconnaissant le caractère arbitraire, et illégal, du dispositif. Pour y mettre fin, elle entamera des démarches auxquelles l’établissement tentera de faire obstruction.

Comble du cynisme, le Garde des Sceaux rendait un réquisitoire le 8 mars dernier, journée internationale du droit des femmes, dans lequel il refuse de reconnaître le préjudice subi par Camille au motif qu’elle n’aurait pas consulté le service médical de la prison. Ce faisant, il met en doute la parole d’une victime d’une mesure sécuritaire s’apparentant à une agression sexuelle répétée, exercée sous la menace et en réunion. Alertée à ce sujet, Dominique Simmonot, Contrôleure Générale des Lieux de Privation de Liberté, confirmait que ce problème avait déjà été dénoncé à la Maison d’Arrêt des Femmes de Fleury-Merogis et avait fait l’objet de recommandations parlementaires.

Les fouilles à nue imposées aux femmes accusées de terrorisme, principalement musulmanes, ne sont pas des faits anodins. Elles témoignent du retour de pratiques héritées des doctrines contre-insurrectionnelles telles qu’appliquées pendant la guerre d’Algérie où le viol a été massivement utilisé comme une arme par l’armée française (voir article paru dans Le Monde). Dans ce contexte, ce n’est pas un hasard si les témoignages de jeunes femmes subissant des agressions sexuelles de la part des forces de l’ordre se multiplient ces dernières années. En témoignent récemment les plaintes déposées par quatre femmes pour « agression sexuelle » contre des policiers à Nantes lors des manifestations contre a réforme des retraites.

À l’heure où de nombreux militant.es et activistes dénoncent le déploiement de techniques contre-insurrectionnelles et militaires à leur encontre ; où le Ministre de l’Intérieur assène des mensonges largement relayés ; et où des technologies de surveillance sont déployées illégalement dans des hauts-lieux d’organisation des luttes sociales ; il semble urgent de prendre au sérieux ces formes de sévices perpétrés par des agents de l’État.

 

TEMOIGNAGE

Libre Flot : un an après l’isolement.

Le 8 décembre 2020, je fus l’une des 9 personnes arrêtées par la DGSI pour une soit-disant association de malfaiteurs terroristes, sans qu’aucun fait n’ait eu lieu et sans l’existence d’un projet quelconque. Ce 4 avril 2023, un an jour pour jour, après la fin de ma grève de la faim de 36 jours, dont l’issue failli être fatale, se déroule au Tribunal Administratif de Versailles une audience sur deux de mes nombreux recours (effectués tous les 3 mois ) contre ce régime de torture. Durant toute mon incarcération préventive, la « justice » refusait alors de les statuer en urgence. Ces refus clairement politiques, comme je l’ai appris, avaient comme seul intérêt de continuer les pressions sur ma personne, sans avoir à respecter leur loi.

Les Nations Unies définissent la torture comme: « tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne; par un agent de la fonction publique ou avec son consentement; dans le but d’obtenir des renseignements ou des « aveux », de la punir, de l’intimider ou de faire pression sur elle ».

C’est exactement ce qui s’est passé lorsque j’ai été placé en isolement, plus encore lorsque cet isolement est imposé en détention provisoire et de manière illégale. Pourtant la circulaire du 14 avril 2011 stipule, en résumé, que l’on ne peut être placé en isolement pour les faits que l’on nous reproche (ou pour lesquels quelqu’un.e a été condamné). La raison doit être un comportement dit « inadapté » ou « dangereux ». Malgré cela, la direction de la maison d’arrêt (MA) de Bois d’Arcy m’a imposé pendant seize mois l’isolement en disant très clairement qu’elle se basait uniquement sur les faits reprochés, tout en reconnaissant que mon comportement ne posait aucun problème. J’ai aussi pu apprendre de la bouche même du directeur des détentions de la MA des Yvelines que mon placement et mon maintien à l’isolement avaient été décidés depuis le premier jour par des personnes très haut placées et que quoi je dise ou que lui-même dise ou fasse, rien n’y ferait, que cela le dépassait, que je resterai au quartier d’isolement. Donc, sans aucune gène, on bafoue les droits d’une personne et on lui applique la torture dite « blanche ». Sans ma grève de la faim, j’y serais peut-être encore aujourd’hui.

J’ai pu constater la violence de ce procédé et ressentir le désir d’annihilation comme sa finalité. Ce ne fut que lorsque j’ai senti le néant m’absorber que, comme un dernier sursaut de vie, j’ai mis celle-ci dans la balance en commençant une grève de la faim pour m’en sortir. La situation était telle que je n’avais plus rien à perdre, ma vie s’effilochait déjà.

Je ne pourrai pas mieux définir la réalité inhumaine de l’isolement que je ne l’ai fait auparavant dans mes lettres, dont celles d’avril 2021, de juin 2021 et du 18 février 2022 que je vous invite à lire pour mieux saisir l’enfer de cette condition de détention.1 À l’heure actuelle, il m’est encore très douloureux de les lire tant cette expérience violemment traumatisante est incrustée en moi.
Il ne faut pas confondre l’isolement et la solitude. Non! L’isolement est à la solitude ce que la lobotomie est à la méditation. L’isolement n’est pas une torture physique existant par un fait ou un acte, mais une torture plus pernicieuse, invisible, permanente existant par cette absence continue.

Je me suis retrouvé du jour au lendemain, sans aucune relation sociale, ne pouvant sortir de ma cellule qu’accompagné par un·e gradé·e et deux surveillant.e·s, avec palpations et portail de sécurité (au minimum 5 fois par jour). À la fin de chaque parloir, sans exception, il y avait aussi une fouille à nu. Les seules « sorties » le sont dans l’espace anxiogène qu’est la promenade individuelle, boite bétonnée, où les 20m2 trouant le béton au-dessus de nos têtes sont recouverts de multiples grilles et barbelés.

Je pouvais observer les vraies promenades, je voyais les détenus exister, je considérais qu’ils étaient tellement libres. Imaginez la violence de l’isolement pour en être à considérer des gens enfermés 24H sur 24 comme étant libres. Ces derniers ne pouvaient pas me voir à cause de la quadruple dose de barreaux et de caillebotis de ma fenêtre. Je restais encore une fois non-existent.

Je pense que nous construisons notre vision de soi par ce que nous renvoient les autres. Mais alors, comment exister quand il n’y a pas d’autres ? Quand les autres ne nous voient même pas ? L’isolement aurait-il pour but l’annihilation de soi ? Avant même d’être jugé, je devrais cesser d’exister ? Voici quelques-uns de mes questionnements de l’époque.

Des contrôles s’effectuaient toutes les deux heures environs, jour et nuit. La nuit le contrôle était accompagné inévitablement de l’allumage des lumières empêchant ainsi d’avoir un réel sommeil. Les ouvertures des verrous de portes sont bruyantes et se faire surprendre par ce son fait sursauter, donne un à-coup au cœur, une montée de stress.

En isolement de nombreux troubles sont apparus et se sont amplifiés au fil des mois: problèmes de concentration, difficultés à construire sa pensée, hébétude, perte de repères temporels, maux de tête, vertiges, pertes de mémoire, troubles visuels, pression thoracique, douleur cardiaque, douleurs articulaires, problème d’accès à son propre cerveau, peur de la disparition de ses connaissances, etc.

Mais pire que tout, c’était le cerveau qui déraillait, la pensée ne se transformant pas en parole et donc ne recevant pas de retour, n’arrivait plus à se moduler, à se matérialiser, elle devint insaisissable, comme un brouillard confus, l’impression d’être abêti, comme en état de choc, d’être paralysé de la pensée. Mon cerveau fonctionnait au ralenti, les pensées ne se renouvelaient pas et tournaient en boucles sans vraiment évoluer.

Le plus pernicieux dans l’isolement est de rendre le réel irréel. Étant donné que l’on est en permanence seul·e avec soi-même, avec ses propres pensées comme unique interaction, le monde réel ne se matérialise pas. Lors des parloirs, ces uniques moments d’interaction sociale, sont autant de plaisirs que de chamboulements, on passe, sans transition, de la stase cérébrale léthargique au « contact » humain sans temps d’adaptation! Les proches y relatent un monde qui semble imaginaire lors de moments qui, une fois terminés, semblent n’avoir été qu’un songe.

Hormis des visites médicales éclairs (souvent moins d’une minute) au quartier d’isolement, sans garantir un semblant de secret médical, avoir un rendez-vous n’est pas toujours aisé mais plus dur encore est que l’on y soit emmené. Et lorsque ça arrive, tous nos maux sont considérés « normaux au vu de ces conditions de détention ». Je n’ai jamais, malgré me demandes répétées, pu voir un psychologue. Ce qui est intéressant de voir c’est que la mise en isolement crée des troubles psychiques et physiques qui ne peuvent être suivis correctement dû au fait que l’on soit en isolement. C’est un tel non-sens qu’il est difficile de croire que ce soit un accident. En plus de tout ça, l’isolement empêche toute activité au sein de la prison, impossible de travailler, impossible de suivre des cours ou des formations.

L’administration pénitentiaire (AP) impose un rapport de force et un fonctionnement arbitraire. Le respect de nos droits n’est pas acquit, il se gagne par une lutte juridique en interne. Je me demande comment une personne non soutenue par un·e avocat·e, ne maîtrisant pas bien la langue, peut faire respecter ses droits.

[Les Séquelles]

En isolement, je n’avais pas même le loisir de ne rien faire, de me laisser aller à discuter avec d’autres humain·e·s. C’était une question de survie que d’occuper mon temps, ce temps devenu infini et antagoniste. Après ce séjour hors du monde et hors du temps, revenir dans le monde des vivants et leur rythme effréné perturbent mes fonctionnements, je n’ai plus de point de repère, plus de notion, plus d’habitude. Depuis ma sortie, quasiment un an, je ne me suis toujours pas réadapté, j’ai l’impression de nager à contre-courant, je cours mais n’accomplis rien, je m’épuise à me débattre dans une course contre la montre perdue d’avance. Je me sens tel un Don Quichotte se battant contre des moulins à temps.

J’ai bien conscience que dans nos sociétés dites modernes, beaucoup se plaignent de ne pas avoir le temps de faire tout ce qu’iels veulent. Concernant ma sortie d’isolement, je suis passé d’un antipode -où ce temps, par son immobilisme, est une torture- à son extrême opposé. Ce bouleversement d’une telle amplitude m’impacte sans commune mesure alors que je retrouve un semblant de vie réelle.

Les problèmes de mémoire qui surgirent et s’amplifièrent durant cette période d’isolement n’ont pas disparu à la sortie. Les informations continuèrent à sortir aussi vite de ma tête qu’elle en étaient rentrées. Combien de fois n’ai-je pas posé la même question trois ou quatre fois dans la même conversation ? Bien qu’aujourd’hui, il m’arrive parfois de me surprendre et de me réjouir à me souvenir de quelques choses ne m’ayant pas faussé compagnie, je suis encore loin d’avoir retrouvé mes facultés mémorielles. Les retrouverai-je un jour ?

Une des séquelles, des plus dommageables, ce sont les rapports aux autres. Moi qui aime à me définir comme un individu social, je me retrouve à peiner à interagir avec mes semblables. Je suis désormais incapable de me retrouver avec un nombre important d’ami·e·s. Au delà de cinq ou six personnes, je me sens submergé, pris dans un tourbillon de paroles, d’expressions faciales, de langages corporaux, trop nombreux pour être décryptés en même temps. Je me retrouve mal à l’aise et j’ai tendance à m’effacer. Mais même avec un nombre plus réduit, d’autres difficultés font surface. Je peine à différencier ce qui est de l’ordre de la pensée privée et ce qui est de l’ordre de la discussion, du partage. Souvent, je tourne et retourne mes pensées dans ma tête, inapte à les exprimer et incapable de lancer un sujet de conversation. Je suis devenu un piètre interlocuteur.

Alors, dans cette situation, comment rencontrer de nouvelles personnes ? Comment se faire de nouveaux·elles ami·e·s quand les siens sont hors du seul département où je suis assigné ? Me reste bien l’humour dont je suis si friand (à défaut d’être drôle), mais hélas, une épine pointe ici aussi… Comment se permettre de faire des blagues librement lorsqu’on sait que plusieurs de celles-ci, décontextualisées, sont à charge dans notre dossier ? Quand on s’inquiète des conséquences graves que peuvent avoir une plaisanterie anodine, comment conserver une amusante insouciance? Soucieux, je le suis en permanence, sans répit aucun. Quelles relations sociales est-on capable de construire lorsque l’on a que ces propres problèmes en tête, à la bouche ?

Seize mois sans contact humain, avec pour unique contact physique, les palpations des surveillants, cela chamboule considérablement le rapport à l’affect. Une relation ambivalente se créé. Comme un besoin insatiable d’affection qui peut devenir étouffant pour les autres et, à la fois, ne plus vraiment concevoir les contacts physiques comme communication. Se sentir, si ce n’est agressé, tout du moins inconfortable lorsqu’un·e ami·e pose gentiment une main sur son bras, quand un·e ami·e pose deux secondes sa tête sur son épaule. En vouloir trop ou trop peu, ou les deux, encore une fois, c’est un équilibre qui est rompu.

Lorsqu’on nous force violemment à quitter le monde, en nous plaçant en isolement, on se retrouve comme étranger à celui-ci. En sortir ne veut pas dire revenir à la normale. Non, il y a les autres, les vivants et cet être profondément traumatisé qui doit, mais ne sait comment, panser ses plaies. Ne plus savoir ni quoi dire, ni comment le dire, ni se comporter, ni où être, constituent une continuité de l’enfermement même à l’extérieur. La sensation d’être enfermé dans sa tête, dans sa carcasse. Un besoin d’exulter qui n’arrive hélas jamais. Bien sûr cela n’a rien de comparable avec la souffrance subit en isolement, dans les caveaux de la république.

J’ai beau suivre une psychothérapie, je n’en vois pas le bénéfice. Cela me renvoie juste, par la reformulation, en ôtant les dénis et euphémismes utilisés comme mécanisme de défense, l’odieuse torture subie et le v(i)ol de mon être. Espérons que les prochaines phases portent un tant soit peu leurs fruits.

Ce 4 avril 2023, l’État français, par le biais de sa « justice », devra répondre de cet acte de torture illégale, réprimé par sa propre loi. Je n’ai pas d’inquiétude vis à vis du rendu. La fRance est bien connue par les instances européennes des droits humains pour son non-respect en cette matière. Elle a l’habitude de payer, comme si elle se lavait les mains et de continuer ses pratiques inacceptables et ce, soit disant « au nom du peuple français ». J’espère que cette audience sera, à sa modeste échelle, comme une pierre ôtée à l’édifice de la violence carcérale.

30 mars 2023
Libre Flot

 

Pour télécharger et diffuser le témoignage :

LibreFlot_UnAnApresIsolementTélécharger

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[Entraigues, Vaucluse 84] Rassemblement de 3 jours contre la prison

Nous relayons cet appel à mobilisation, paru initiallement sur vallées en lutte.


Depuis 3 ans, le collectif crève la taule 84 se bat contre le projet de construction d’une prison entre Avignon et Carpentras, à Entraigues.

Pour le week-end de Pâques (8, 9 et 10 avril), nous vous invitons à venir poser votre tente ou votre camion à Entraigues, sur la zone du plan, là où l’an dernier poussaient des tournesols et où l’an prochain l’état espère faire pousser une énième prison dans le cadre du plan de construction de 15000 places d’enfermement.
Ensemble, et durant ces trois jours, nous allons discuter, partager, apprendre, s’amuser, bref, célébrer le vivant plutôt que se préparer au béton et à l’enfermement !
Programme et texte d’appel joints.
Plus d’infos : nibetonnimaton [at] riseup.net

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Version février 2023 de la brochure « Le vélo et le feu », sur des incendies de véhicules de grandes entreprises et du corps diplomatique et sur l’arrestation d’un compagnon anarchiste

Voici la dernière version (février 2023) de la brochure « Le vélo et le feu », sur des incendies de véhicules de grandes entreprises et du corps diplomatique et sur l’arrestation d’un compagnon anarchiste :

Version brochureversion page par page

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Communiqué #3 du SISME : Verdict confirmé : le montant de la rançon reste 100 000 euros

Lien du communiqué n°3

Voici les conclusions du délibéré du 23 mars (appel du contrôle judiciaire) concernant l’un.e des inculpées de sabotage de mâts de mesure éoliens, en Haute-Vienne.
N’hésitez pas à lire les communiqués précédents pour plus d’informations sur l’affaire :
Communiqué #1 (février 2023) : Soutien aux personnes inculpées pour le sabotage de mâts de mesure éoliens
Communiqué #2 (mars 2023) : 100 000 euros, le prix de la liberté

L’appel du contrôle judiciaire avait été fait car le système judiciaire prend en otage cette personne, lui demandant la somme de 100 000 euros contre de la détention préventive (4 mois renouvelables), alors qu’il n’y a pas eu de jugement.

Verdict : la rançon reste la même. Toutefois, la cour d’appel a statué sur le cautionnement, avec une petite variante : parmi ces 100 000 euros à payer,

  • 5 000 euros feront office de garantie de représentation et d’amendes (pour la justice) ;
  • et 95 000 euros pour rembourser les dégâts d’un des mâts de mesure éolien construit par la société WPD ON SHORE FRANCE à Rilhac-Lastours (87), alors qu’il n’y pas de certitude de sa reconstruction.

Même si nous n’attendons rien de cette institution, force est de constater que la justice défend encore les intérêts des entreprises capitalistes et, pour le coup, n’attend même pas qu’un jugement puisse être mené avec une vraie défense !
Des bouts de ferraille tombés alors que, même s’il n’y pas de vent, les éoliennes industrielles sont quand même construites !
Que du vent !!!
La personne a jusqu’au 14 avril pour décider si elle paye la rançon pour sa liberté.
Solidarité aux courageuses !

P.-S.

Pour être tenue informée et/ou proposer textes et action s’inscrire que la liste en envoyant un mail à sisme-request@lists.riseup.net

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Communiqué #2 du SISME : « 100 000€, le prix de la liberté »

Voici le 2ème communiqué du SISME (comité de Soutien aux Inculpées de Sabotage de Mâts de mesure Eoliens). Pour rappel, une banderole solidaire ainsi qu’un texte avaient été faits depuis Bure, il y a quelques jours : article à lire ici.

 

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Communiqué #2 en format A4 recto-verso

Communiqués #1 et #2 en format page par page A4 (à agrapher)

Communiqués #1 et #2 en format brochure A3 (à plier)

 

 

Le 18 janvier à 6 heures du matin, quatre personnes ont été arrêtées, leurs lieux de vie perquisitionnés, une partie de leurs biens saisis. Elles sont accusées de sabotages de mâts de mesure de projets d’éoliennes industrielles en Haute-Vienne, entre juillet et octobre 2022.

Le récit :

Pendant la garde à vue de l’une d’entre elles, dès le deuxième interrogatoire, les enquêteurs alignent le montant des dégâts.

Les prédateurs, SAS WPD ONSHORE FRANCE, ENGIE GREEN S.A. et RPGLOBAL FRANCE qui ont porté plainte n’ont pas perdu de temps, et ont déjà fourni des factures de réparation des dommages (même si d’après leurs déclarations ils n’ont pas la ferme intention de reconstruire ces mâts) pour un montant total de 350 000 euros.

Après 38 heures de garde à vue et une heure passée dans la souricière du tribunal de Limoges, la personne passe devant la juge d’instruction. Il est 20 heures, la juge énumère les chefs d’inculpations. En résumé : « Destruction de biens d’autrui », participation à « association de malfaiteurs en vue de préparation d’un délit puni d’au moins 5 ans d’emprisonnement, commis en réunion par une ou plusieurs personnes dissimulant volontairement leur visage afin de ne pas être identifiées » ; « refus de se soumettre aux opérations de relevés signalétiques ».

Vient ensuite la réquisition sur le contrôle judiciaire :

Interdiction de sortir de la Dordogne ; Pointage chaque semaine à la gendarmerie ; Interdiction de rentrer en contact avec les autres inculpées et paiement d’une caution de 180 000 euros !

L’avocate commise d’office sollicitée par la juge sur le montant de la caution, rétorque qu’il s’agit-là d’une mesure pré-sentencielle et propose « moins de 50 000 euros ». L’avocate et l’inculpée sortent. La juge délibère avec elle-même et au bout de 5 minutes propose finalement 100 000 euros : 20 000 euros pour amende et 80 000 pour indemnisation des dégâts.

Cette discussion de marchand de tapis n’aura pas duré plus de quelques minutes.

Total demandé aux 4 inculpées = 120 000 euros

Les autres inculpées se partagent le solde de 20 000 euros

Fin de la comptabilité.

Deux jours plus tard la demi-page dans Sud-Ouest consacrée à l’affaire affirme que le montant des dégâts est de 500 000 euros.

Tout ceci avant jugement

La peine, c’est la procédure.

Les outils répressifs de la dite « justice »:

Nous préférons parler de « système judiciaire » car on voit clairement cette alliance structurelle entre l’Etat et le capital.

– L’argent (caution)

Le prix de la liberté.

Le deal est maintenant: Si tu veux rester en liberté, paye 100 000 euros.

100 000€ ou de la préventive, en plus du racket, c’est vouloir faire payer cher, coûte que coûte, les inculpées ; encore une fois la justice de l’Etat est au service du capitalisme (80 000 euros d’indemnisation avant jugement).

– Le contrôle judiciaire

Imposer des contrôles judiciaires qui limitent les déplacements, constituent une peine immédiate et à la durée non délimitée. L’interdiction d’entrer en contact entre les inculpées limite d’autant plus la défense collective face à la justice.

– Discrimination entre les inculpées

avec l’inégalité des demandes de caution, qui est là aussi pour diviser.

– La prison préventive

Une grande partie des détenues en France sont en préventive/en attente de jugement ; à l’heure où l’Etat construit en ce moment de nouvelles prisons avec son énième Plan Prison, pour enfermer toujours plus.

Si la destruction de quelques mâts de mesure est au regard de la loi un délit, c’est pour nous un acte de résistance légitime commis sans violence sur des êtres vivants, c’est un acte symbolique qui ne fait qu’entamer l’assurance sans borne, la volonté de conquête de ces prédateurs cupides.

Dans un contexte de guerre sociale, ces actes nous semblent de l’ordre de l’auto-défense.

Les vraies victimes ne sont pas celles que la justice désigne. Les vraies victimes sont celles de ces prédateurs que rien n’arrête.

La personne risque la détention provisoire parce qu’elle ne veut pas payer sa liberté. C’est du racket.

Parce qu’elle ne veut pas indemniser les prédateurs capitalistes ;

Parce qu’elle veut faire savoir ce qu’est le système judiciaire aujourd’hui ;

parce qu’elle veut que la cause anti-éolienne et anti-capitaliste soit entendue ;

Elle va tenter d’aller jusqu’au bout. Ne pas céder au chantage.

Il y a eu un appel de cette décision, le résultat de l’audience du 9 mars dernier à Limoges sera rendu le 23 mars prochain.

Même si on ne reconnaît pas cette « justice », peut-on quand même la critiquer et s’insurger ? Nous pensons que oui puisque nous vivons dans ce monde-là, nous devons nous défendre.

Nous soutenons les personnes accusées de sabotages de mâts de mesure d’éoliennes, qu’elles soient coupables ou innocent-es, car ces actions sont un souffle de résistance contre l’absurdité de ce monde autoritaire et le capitalisme vert.

Nous appelons à des actions de solidarité décentralisées

Solidarité aux courageuses!

Pour être informée et proposer des actions de soutien, s’inscrire sur la liste à sisme-request@lists.riseup.net

Communiqué #1 du comité de Soutien aux Inculpées de Sabotage de Mâts de mesure Eoliens (SISME)

* Le comité de Soutien aux Inculpées de Sabotage de Mâts de mesure Eoliens (SISME) *

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